samedi 21 mai 2011

Mes activités au sein de l’élevage

Arturo étant à l’étranger depuis fin mars, je m’occupe du bon fonctionnement quotidien de l’élevage. Je suis chargée de travailler, avec Patty et Nelson, au maintien des aquariums, à l’alimentation des grenouilles, à arranger ce qui ne marche plus et acheter ce qu’il nous manque !



En plus, Arturo m’a chargé d’améliorer leur technique de travail pour la rendre plus systématique. J’ai donc créé ou amélioré leur fiches de données, où l’on note chaque activité : alimentation, maintenance, température, qualité de l’eau, etc. Nous avons donc réorganisé le travail au laboratoire de manière à rendre les données statistiquement analysables.

(Alimentation d'un individu de l'espère du lac Titicaca avec du "tubifex")


Un autre aspect important de mon travail ici a été de préparer un protocole d’identification descriptive et de mesures des individus adultes, et de l’appliquer. Tâche qui n’a pas toujours été évidente à cause du manque de matériel, d’espace et de disponibilité d’eau. En effet, la commune de Cochabamba nous fournit l’eau du robinet, mais pas tout le temps ! Ce qui n’est pas pratique lorsque nous devons remplir des aquariums, rincer notre matériel, etc. Pour y remédier, j’ai fait installer un réservoir de 1000 litres avec une pompe à eau et un système de flotteur (comme dans les toilettes), pour disposer d’eau en permanence ! Les installations sont toutes nouvelles et beaucoup d’améliorations restent à faire. Nous avons donc, finalement, pu identifier, mesurer et peser chaque individu, selon un protocole évitant de contaminer les individus provenant de différents aquariums et minimisant leur stress. Avec ces informations et des photographies de chacun, je vais remplir une base de données qui permettra de suivre l’évolution de chaque grenouille individuellement, ce qui n’était pas possible auparavant !

(Telmatobius hintoni - laboratoire du Museo de Historia Natural)

L’élevage des grenouilles au Musée

L’élevage des grenouilles de quelques espèces du genre Telmatobius représente la partie de Conservation du projet « Bolivian Amphibian Initiate ». Les individus que nous élevons dans nos aquariums ont été prélevés sur le terrain, lors de nos campagnes de prospection des populations sauvages. Le but est, premièrement, de les maintenir en captivité afin d’arriver à les faire se reproduire. De cette manière, une petite population pourra être obtenue au laboratoire. La finalité de cette opération étant la réintroduction de ces populations dans leur milieu naturel.

Cela ne se fait pas n’importe comment, bien entendu. Arturo a suivi plusieurs formations d’élevage de grenouilles vulnérable ou en danger d’extinction. Il a réussi à obtenir des fonds lui permettant d’acheter des installations : aquariums, climatisation, et autres matériel nécessaire au bien-être des animaux. Tout cela ne se fait pas du jour au lendemain. Il est d’ailleurs actuellement en train de suivre une formation sur la réintroduction d’amphibiens dans les rivières, en Angleterre. Tous ces nouveaux savoirs et techniques lui permettront d’optimiser son élevage et de rétablir des populations éteintes dans certaines localités.

Pour l’instant, nous en sommes au stade de maintenir les grenouilles en vie, de leur apporter des conditions stables et de la nourriture régulière pour favoriser leur reproduction. En effet, ce sont des animaux sensibles et si leur milieu n’est pas favorable, ils ne se reproduiront pas. Arturo possède déjà un couple qui a eu, avec succès, une descendance en captivité. Nous avons donc des têtards et quelques juvéniles de cette espèce. Ce dernier stade est particulièrement délicat, et la mortalité est grande. Cependant, nous avons réussi à faire survivre un grand nombre d’individus (probablement plus que dans les conditions naturelles).

jeudi 19 mai 2011

Pourquoi conserver des grenouilles ?

Beaucoup de gens me demandent : quel est l’intérêt de protéger ces grenouilles ? Quel est leur rôle dans les écosystèmes ? Sont-elles si importantes que ça ?

A ces questions, existent plusieurs réponses justifiant l’intérêt du projet. D’ailleurs « Bolivian Amphibian Initiative » est un projet soutenu par de nombreuses fondations étrangères spécialisées dans les amphibiens. Ce qui prouve l’importance au niveau global de la conservation de ces animaux ! En effet, depuis une décennie, les études sur les amphibiens se sont multipliées dans le monde entier. 2008 avait été nommée « Année international de la grenouille » afin de promouvoir ces études et de sensibiliser la population face aux menaces qui pèsent sur les amphibiens. Les scientifiques se sont rendus compte que les amphibiens font parties des animaux les moins étudiés de la planète et qu’ils sont parmi les plus menacés par les activités humaines !

Maillon de la chaine alimentaire et contrôle biologique :

Les amphibiens contribuent à l’équilibre de l’écosystème, comme chaque espèce qui y habite, en faisant partie de la chaine alimentaire. Ils sont les proies de nombreux animaux (serpents, oiseaux, mammifères, etc.) et permettent donc leur survie. D’autre part, ils se nourrissent de nombreux invertébrés (insectes, vers, escargots, etc.) et permettent donc de contrôler leurs populations afin d’éviter leur prolifération. Les amphibiens sont donc des agents de contrôle biologique car ils permettent de réguler les populations d’insectes, dont certains sont des vecteurs de maladies telles que la malaria, ou des pestes pour les cultures locales !

Bio-indicateurs :

Les amphibiens sont très sensibles aux altérations de leur milieu. En effet, leur peau, semi-perméable, leur permet d’échanger des gaz avec l’air ambiant. C’est-à-dire qu’en plus de leurs poumons, ils respirent à travers leur peau. De plus, de nombreuses glandes sont présentes sur leur peau ayant de nombreuses fonctions vitales pour les grenouilles. Les propriétés de leur peau les rendent si sensibles à la pollution et aux changements environnementaux. De plus, ce sont des animaux à sang froid et ils sont donc aussi sensibles aux variations de températures. Dès lors, lorsque les grenouilles ou autres amphibiens sont abondant dans un écosystème, cela montre qu’il se trouve en bonne santé, qu’il est pas ou peu perturbé et pollué. Alors que, lorsque les populations d’amphibiens déclinent ou disparaissent, cela signifie qu’il y a un problème dans la qualité du milieu. Les scientifiques étudient donc les grenouilles afin de savoir quels sont les endroits pollués. Une fois identifiés, il reste à trouver la cause de la pollution pour pouvoir y remédier !!!

Partie importante de la Biodiversité, elles sont aussi utiles pour l’homme :

Les amphibiens font partie intégrante de la diversité et richesse biologique de notre planète. Elles se sont adaptées à presque tous les écosystèmes du globe, ont développé des formes et des couleurs des plus diverses et étonnantes, le simple fait de se métamorphoser, du têtard à la grenouilles, les rend fascinants ! Or, nombreuses activités humaines mettent en danger leurs populations, comme la déforestion, la fragmentation de l’habitat, la pollution des eaux et des sols, les feux de forêt, etc. en plus de la mycose chytride qui ravage de nombreuses population à travers le monde. Nous avons donc le devoir de préserver les espèces menacées ainsi que leur milieu. Protéger les grenouilles, c’est aussi préserver tout un écosystème qui leur est associé. Nous avons la responsabilité de transmettre aux générations futures un patrimoine naturel aussi riche que celui qui nous a été offert !

D’autre part, certaines grenouilles sont particulièrement étudiées aujourd’hui pour certaines caractéristiques qui pourraient fortement aider la médecine moderne. Des substances utiles contre les ulcères, contre le cancer, des anesthésiants sont naturellement produits par ses animaux, qui sont par-là précieux pour la science ! De plus, de nombreuses cultures utilisent les grenouilles dans leurs rites ou prennent leur poison pour la chasse. Beaucoup de légendes tournent autour de ces petites bêtes qui, souvent, symbolisent la chance, la fertilité, la richesse…


MON STAGE 3ème PARTIE : Arrivée au Musée d’Histoire Naturelle « Alcide d’Orbigny »

Après mes aventures au Lac Titicaca et à travers l’Altiplano, nous voilà revenu dans la civilisation. A Cochabamba, je découvre l’appartement qu’Arturo m’avait réservé, en bas de chez lui, au troisième étage d’un petit immeuble. Il est très spacieux, tout neuf, et surtout … pas cher !!! Il donne sur un par cet des terrains de football et se situe près de la Laguna Alalay.

Une fois installée et reposée, je suis présentée à l’équipe travaillant au Musée : Patricia et Nelson (nouvelle recrue). Je rencontre également les autres chercheurs, le directeur et quelques stagiaires et volontaires. L’ambiance y est conviviale, tout le monde se connait et s’entend bien. L’endroit lui-même représente un petit coin de Paradis dans la ville. En effet, le Musée se trouve dans un jardin presque sauvage, reculé par rapport à la rue, entouré d’arbres et palmiers. On y accède en entrant par un grand portail vert et en suivant une petite allée de terre.

De nombreuses écoles de la ville viennent visiter le Musée avec des enfants de tous âges. Les visites se font par groupes de 20 maximum, pendant ce temps les autres peuvent jouer ou attendre à l’extérieur, sans les dangers de la circulation. Dès mes premiers jours de travail au Musée, j’arrivais vers 9h ou 9h30 et nous prenions un café tous ensemble, certains ramenaient des biscuits, du pain ou autres pâtisseries à partager ! Cela renforce la cohésion entre les membres, qui ne sont pas payés pour travailler, et l’envie de se lever et d’aller au boulot. En effet, chaque personne au Musée travaille, comme Arturo, sur un projet personnel dont les financements viennent de l’extérieur. Le Musée lui-même ne vit que des maigres contributions laissées par les visiteurs et de la passions de ses membres ! Cette équipe chaleureuse va vraiment me manquer lorsque mon stage sera terminé.